du devellopement durable et de la transition ecologique

Interview avec Éric Konan, Coordonnateur du Projet Paiement des Réductions d’Émissions (PRE) « Le projet PRE a déjà réduit 20 millions de tonnes de CO2 »

Dans le cadre de la transition écologique et de la lutte contre le changement climatique, la Côte d’Ivoire a mis en œuvre le Projet Paiement des Réductions d’Émissions (PRE). Ce projet pilote, inscrit dans le mécanisme international REDD+, permet de réduire les émissions de CO2, de protéger les forêts et de récompenser les communautés locales.

Pour en comprendre les enjeux, nous avons rencontré Éric Konan, coordonnateur du projet PRE.

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Éric Konan (EK) : Bonjour, je suis Éric Konan, ingénieur des Eaux et Forêts et coordonnateur du Projet Paiement des Réductions d’Émissions (PRE). Ce projet s’inscrit dans la phase de paiement basé sur les résultats du mécanisme REDD+.

Qu’est-ce que le projet PRE et quelle est sa durée ?

EK : Le PRE vise à réduire la déforestation et la dégradation des forêts, à valoriser les réductions d’émissions de CO2 sur les marchés du carbone et à redistribuer les revenus issus de la vente des crédits carbone aux bénéficiaires.
La première phase a démarré en 2020 pour une durée de cinq ans, suite à la signature d’un contrat entre la Côte d’Ivoire et le Fonds carbone de la Banque mondiale.

Quelles sont les zones concernées par ce projet ?

EK : Le projet couvre cinq régions administratives autour du parc national de Taï : Cavally, Guémon, Nawa, San-Pédro et Gbokle.

Quels sont les objectifs prioritaires ?

EK : Les priorités sont claires : réduire les émissions de gaz à effet de serre, augmenter la séquestration de carbone à travers le reboisement et l’agroforesterie, et redistribuer les revenus générés aux communautés locales et partenaires.

Quelles activités menez-vous concrètement ?

EK : Nous travaillons sur trois grands axes : à savoir la conservation des forêts, le reboisement de zones dégradées, et l’agroforesterie, notamment l’introduction d’arbres forestiers dans les plantations de cacao.

Qui sont les bénéficiaires du projet ?

EK : Les bénéficiaires sont toutes les personnes et structures des cinq régions concernées qui pratiquent l’agroforesterie, le reboisement ou la conservation des forêts. Cela inclut les planteurs, les communautés locales, les coopératives, mais aussi les administrations, ONG et organisations qui accompagnent les populations.

Comment mesurez-vous les réductions d’émissions ?

EK : Les réductions sont calculées selon les standards internationaux du Fonds carbone de la Banque mondiale. Nous disposons d’experts en télédétection et inventaire de gaz à effet de serre qui établissent ces données. Elles sont ensuite vérifiées et certifiées par des auditeurs indépendants mandatés par la Banque mondiale. Une fois certifiées, les paiements sont déclenchés.

Les communautés locales sont-elles réellement impliquées ?

EK : Elles sont plus qu’impliquées : elles sont au cœur du projet. Ce sont elles qui réalisent les activités sur le terrain. Sans leur engagement, il n’y aurait pas de PRE.

Comment avez-vous convaincu les populations de conserver leurs forêts ?

EK : Cela n’a pas été facile. Depuis 2013, la Côte d’Ivoire mène des campagnes de sensibilisation. Progressivement, les communautés ont compris qu’il est possible de produire sans détruire la forêt. Aujourd’hui, elles voient l’agroforesterie comme une source de revenus et une garantie de durabilité.

Quels résultats avez-vous obtenus jusqu’à présent ?

EK : C’est environ 20 millions de tonnes d’équivalent CO2 qui ont été réduites et certifiées au cours de la période allant du 20 octobre 2020 au 31 décembre 2023, avec environ 8 millions de tonnes supplémentaires qui sont en attente de vérification pour l’année 2024. Et pour le premier appel à manifestation d’intérêt, ce sont environ 59.000 bénéficiaires qui ont été recensés dont 43.000 ont été jugés éligibles au paiement et 28.000 de ces 43.000 bénéficiaires-là ont fait l’objet de vérification donc leurs activités ont effectivement été vérifiées sur le terrain et 11.500 ont déjà reçu leur paiement pour un peu plus de 1,5 milliard de francs CFA qui ont été distribués et les paiements y se poursuivent.

Comment fonctionne le mécanisme de paiement ?

EK : Les paiements sont effectués par la Fondation pour les Parcs et Réserves, directement sur les comptes bancaires ou mobiles des bénéficiaires.
Le montant varie selon la superficie et l’activité réalisée. Par exemple, un hectare d’agroforesterie avec 25 arbres rapporte environ 30.000 FCFA.

Quelles mesures garantissent la transparence dans la gestion des fonds ?

EK : Un plan de partage des bénéfices a été élaboré et validé par toutes les parties prenantes. Il définit les bénéficiaires et les modalités d’accès aux paiements. En plus, des audits indépendants sont réalisés régulièrement pour s’assurer du respect de ce plan.

Comment assurez-vous la durabilité des acquis après le financement ?

EK : Nous observons déjà une amélioration de la résilience des plantations grâce à l’agroforesterie. De plus, une partie des revenus est placée dans un fonds de dotation géré par la Fondation pour les Parcs et Réserves, qui généreront des intérêts pour maintenir les paiements à long terme.

Y a-t-il encore une possibilité de s’inscrire au projet ?

EK : Oui. Le deuxième appel à manifestation d’intérêt est ouvert jusqu’au 22 octobre 2025. Les personnes peuvent s’inscrire en ligne sur www.projetpre.ci ou auprès des services déconcentrés des ministères concernés, des autorités locales et des coopératives partenaires.

Quel message souhaitez-vous adresser aux communautés et aux journalistes ?

EK : Aux communautés, je dis : l’argent est disponible, venez-vous faire recenser pour bénéficier de vos efforts en faveur de la forêt.
Aux journalistes : soyez nos relais pour diffuser l’information partout, jusque dans le plus petit village. C’est ainsi que toutes les personnes concernées pourront profiter des retombées du projet.

Interview réalisée par Randohle A., dans le cadre du projet Afrikibarru 2 financé par Canal France International (CFI), dont AgrotvCI est bénéficiaire.

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